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LE MESSAGER DU RHIN
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manda le jeune homme. Le bourg-
mestre avanca et lui tendit une
bourse pleine.
— Entrez! dit l'adolescent. Mais
quand le bourgmestre eut franchi le
seuil, le jeune guerrier referma avec
grand fracas la porte et poussa les
verrous. Ses camarades donnerent
l'alarme, et les Strasbourgeois eurent
beau cogner contre la perte, eile ne
ceda pas. Et quand les bourgeois de
Riquewihr commencerent ä tirer sur
eux, ils se retirerent penauds.
Le bourgmestre cependant etait
prisonnier. Le jeune homme s'etait
saisi de lui et ne l'avait plus lache.
II fut ligote et traduit devant le tri-
bunal de la ville qui le condamna ä
mort pour trahison. Mais comme le
gibet se trouvait en dehors des murs,
le bourgmestre ne put pas etre
pendu. Le tribunal trouva une autre
peine de mort : il fut conduit dans
une cave vide. On lui donna un
crucifix en mains pour qu'il püt de-
mander pardon ä Dieu de ses peches
et de sa trahison honteuse. On lui
donna une chandelle comme derniere
lumiere. On lui donna encore un
verre d'eau pour humecter la bou-
che seche. Puis les hommes se retirerent
sans un mot, et le bourreau
mura l'entree de la cave. Personne
n'entendit les cris, les pleurs, les
gemissements du malheureux, du
traitre de sa ville.
On raconte encore ä Riquewihr
cette autre legende qui ressemble
etrangement ä la premiere :
Pendant la guerre de Trente Ans,
les Suedois qui avaient envahi l'Al-
sace, assiegerent en 163 5 la ville de
Riquewihr, mais ils ne parvinrent
pas ä rompre les fortes murailles et
ä ebranler le courage des bourgeois.
C'est alors qu'un habitant de Zellenberg
leur promit contre un gros sac
d'argent de leur montrer pendant la
nuit une partie inoccupee et facile-
ment accessible de la muraille pour
pouvcir s'emparer de la bourgade.
La.surprise reussit, les Suedois pri-
rent Riquewihr qui fut affreusement
pille, de sorte que sa prosperite dis-
parut pour de longues annees. La
colline par laquelle les Suedois
etaient venus s'appelle aujourd'hui
encore le « Armenberg », le mont
des pauvres.
Des annees passerent. Riquewihr
se releva, les bourgeois se remirent
äprement au travail. Un jour, ils ar-
riverent ä s'emparer du traitre qui
avait livre la localite. Iis le tradui-
sirent immediatement devant le tribunal
, et il fut condamne ä mort.
Les gens de Riquewihr le trainerent
ä l'endroit de la muraille par lequel
il avait fait passer les Suedois, et ä
cet emplacement meme il fut mure
vivant dans la pierre. En Souvenir
de sa trahison son effigie avec un
gros sac d'argent sur le dos fut
sculptee dans la pierre. S.
Revolte des habitant* de la seigneurie de Boll willer
et enleyement des titres des archives le 29 juillet 1789
Apres la prise de la Bastille, le 14 juillet 1789, la
fievre revolutioniere ne tarda pas ä gagner aussi la
seigneurie de Bollwiller. Depuis quelque temps dejä le
feu couvait sous la cendte. Les nouvelles venant de
France etaient avidement commentees. On tenait des
conciliabules et l'on etait decide, le moment venu, ä
faire entendre les revendications si longtemps conte-
nues ou etouffees.
L'attente ne fut pas de longue duree. Le 29 juillet,
de bon matin, plusieurs centaines de personnes s'assem-
blerent devant la maison de Felix Francois Jacquot, re-
ceveur general de la seigneurie, et le sommerent de leur
rendre leurs anciens droits et de leur remettre les
titres des archives:
Avant d'en venir ä et soulevement, nous allons
rappeler, dans ses grandes lignes, l'histoire de la
seigneurie.
I. La seigneurie
Le village de Bollwiller apparait pour la premiere
fois dans les documents anciens en 786. II appartenait
alors — en entier ou en majeure partie seulement, qui
saurait le dire? — ä l'abbaye de Murbach. En l'annee
786 Wolfard et Hadwin vendent ä l'abbe Anichon
deux proprietes situees « dans la marche de Bollwiller ».
Mais des 817 le couvent d'Ebersmünster y possedait
aussi des biens. Iis lui avaient ete donnes non par
Murbach, mais par Louis le Debonnaire.
En 1259 les comtes de Habsbourg, les puissants
avoues de l'abbaye, les donnerent en fief aux nobles
de Eollwiller, dont les descendants jouerent dans l'histoire
de l'Alsace un röle considerable, et dont le plus
ancien representant que nous connaissions, Gebhart de
Bollwiller, nous est Signale en 113 5 par la charte de
fondation de l'abbaye de Goldbach, qui le qualifie de
« libre ».
En 1300 les Bollwiller sont dejä bien puissants.
Iis sont apparentes aux celebres comtes de Ferrette et
reeoivent d'eux un tiers de la vallee superieure de
St-Amarin avec le mont Wildenstein, oü Pierre de
Bollwiller bätira le chäteau de meme nom. Jean de
Bollwiller vendait ces biens ä Murbach en 1 536, pour
1500 florins. Au 16e siecle Ferdinand Ier leur donne
en fief le val de Ville; Feldkirch est donne en fief par
la Maison d'Autriche, Pulvershe'm en sous-fief par les
Ribeaupierre; deux tiers d'Ungersheim leur sont vendus
par les Reinach (Lautre tiers appartenait ä Ensisheim);
Reguisheim leur est vendu par les Morimont; au
16e siecle ils sont investis de Flaxlanden et de Heimsbrunn
, qui avaient appartenu ä la seigneurie de Mase-
vaux; ils possedent des biens importants ä Raeders-
heim. En 1612 Rodolphe de Bollwiller est aussi
seigneur de Masevaux, de Hilgartsberg et de Florimont.
Rodolphe n'ayant point d'heritiers mäles, la seigneurie
passa aux Fugger, gräce au mariage de sa fille Mar-
guerite avec Jean Ernest Fugger1. Les Fugger la ven-
1 Assistaient ä ce mariage : l'eveque de Constance qui
Signa le contrat, Christophe Fugger, baron de Kirchberg et
de Weissenhorn, seigneur de Mündheim, conseiüer et came-
rier du roi Ferdinand et de l'archiduc Maximilien, Max
Fugger, frere de Jean, Georges baron de Kerolseck et d'Ar-
lendorf, seigneur de Rothenfels et de Stauffen, Eberhard de
Ribeaupierre. Hohnack et Geroldseck, Jean, baron de Morimont
et de Beifort.
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