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LE MFSSAGER DU RHIN
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Dans la maison endormie, tout se tait; les enfants reposent dans la piece voisine, ei je 2
goüte enfin la quietude d'un repos tant attendu apres les multiples besognes du jour. <>
Lampe allumee, fenetres closes, qu'il lait bon jouir de la douce tiedeur de la chambre, |
alors que la pluie, violente et brutale, claque les vitres et meurtrit le jardin plein d'ombre. f
L'annee s'acheve . . . Dans quelques heures le temps emportera vers l'oubli les mois ecou-
les, les jours enluis charges de Souvenirs.
Mes doigts distraits retournent l'almanach de 1947, iletri, tache, zebre de ratures, de
mille lignes enchevetrees, bizarres, tracees par une main malhabile et desobeissante.
Sur mes epaules latiguees, est-ce le poids de l'annee defunte qui pese lourdement. . .,
de cette annee qui egrena ses Saisons, ses mois, ses semaines, avec une regulärite impla-
cable ?
Que reste-t-il de ces heures, de ces jours ecoules ? Certains furent endeuilles, pleins
d'apprehensions et de crainte ...
Les autres. . . , les jours ensoleilles par la tendresse, ennoblis par l'effort, idealises par
la joie, les avons-nous goütes avec discernement ? En avons-nous distale, savoure, la subtile
douceur ? De leur passage subsiste un souvenir Charge de chaleur et d'amour . . .
D autres jours ont suivi. . . , ternes, gris. . . , sans reliei. Iis ont passe, fragiles et rapides,
remplis de preoccupations mesquines, de vouloirs impuissants : dans la corbeille du temps,
aupres des bourgeons en promesse et de Yepanouissement des corolles, Hs se cachent,
tristes rameaux, honteux de leur nudite sombre. f
La pendule poursuit son chemin dans la müt silencieuse. Foin maintenant des remords
tardifs, des regrets steriles. Paix ä l'heure passee: une aurore va naitre; vers cet espoir
nouveau, il laut lever les yeux.
Dans la cheminee qui flambe, je jette lentement le vieil almanach. Les Hammes avides
lechent cette proie qui se tord, se convulse, pour n'etre bientöt qu'un minuscule tas noi-
rätre. Le bois petille, des etincelles s'entrecroisent. . . J'admire « ces mignons coryphees
de l'ätre qui reviennent, se melent, se poursuivent, toujours differents, libellules de mica,
guepes de topaze, butinantes abeilles du phosphore et du soulre >■>...
Le nouvel alamanach, celui de 1948, fait son entree dans la maison, pimpanl sous sa
couverture illustree.
| Que nous appcrtc-t-il ?
I Annee nouvelle, laisse-moi entrevoir tes douceurs, tes promesses . . .
I Päques, Ascension, Fete-Dieu, les mots dansent devant mes.yeux, et aussitöt mon Imagination
vagabonde, echaiaude une feerie charmante, cree un ballet delicat qui se de-
I roule en cadence.
Le petit dieu Printemps s'avance tout radieux, presentant ses prairies emaillees d& mi-
nuscules päquerettes et de boutons d'or, ses amandiers en fleurs et ses cerisiers llamboy-
ant sous un ciel leger . . .
Mai, mois marial, beni entre tous, se couronne de muguets,
Juin s'encadre sous les arceaux de roses d.ont le cceur lourd. de soleil sert de couchette
aux bourdons ivres de parfums.
Juillet, aoüt lui succedent, ayant pour eux les cris d'eniants joyeux au bord des plages
et sur les sentiers lleuris.
L'automne vient ensuite, un peu grave, drape dans sa robe d'un rouge orange tres doux,
leinte de vert ou de fauve, les mains pleines de lourdes grappes de raisin et de feuilles
rougies.
Mais tous ces enchantements de la nature s'estompent bien vite, et seule demeure en
moi la perspective des joies pures, des delicats bonheurs parsemes sur la grand'route.
L'amour et la tendresse s'enlacent sur ce long ruban, sur cette page immaculee que repre-
sente l'annee nouvelle.
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