Freiburger historische Bestände - digital

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LE MESSAGER DU RHIN

cative apres que l'echec de la Conference de Mos-
cou eüt montre une fois de plus le fosse qui separe
les conceptions occidentale et Orientale d'organi-
sation du monde.

Sur un plan de moindre portee, mais egalement
typique de l'etat virulent des passions partisanes,
se situe le fameux « complot des soutanes » ä l'oc-
casion duquel certain sectarisme, qu'on avait pu
croire un instant perime, se donna libre cours. II
est vrai que les tenants de ce meme sectarisme s'at-
tirerent en l'occurence la verte et combien vigou-
reuse replique d'un grand resistant, le pere Riquet,
lequel, du haut de la chaire de Notre-Dame, rappe-
la les « super-patriotes » des feuilles anti-religieu-
ses ä une plus exacte notion des choses.

Et voilä que, subitement, d'un jour ä Lautre', ä
lafin du printemps: catastrophe dans Lapprovision-
nement en pain, de Paris et de la plupart des re-
gions francaises. La ration quotidienne est abaissee
de 50 grammes, mais ce qui est plus grave, la qua-
lite du pain atteint un niveau rarement vu sauf
dans les sieges des villes du temps passe. Resultat
de Lincoherence en matiere- de ravitaillement dans
laquelle le gouvernement tire ä hue et ä dia par les
Partisans du dirigisme et du liberalisme se debat
pratiquement depuis la Liberation. Resultat aussi
d'une politique agricole absurde qui accorde plus
de valeur au mais, ä l'orge ou ä l'avoine qu'au ble.

A4ais le gouvernement, pere-nourricier, voit si-
multanement ses soucis s'accroitre ä nouveau dans
la politique. La solidarite ministerielle n'est plus
qu'un mot vide de sens : les communistes ne se
genent pas, tout en faisant partie de ce gouvernement
, de le critiquer violemment. De jour en jour
la Situation devient plus intenable jusqu'au moment
oü, les ministres communistes ayant ä LAssemblee
Nationale vote sans vergogne contre le cabinet
Ramadier, le president du Conseil des Ministres
remanie Lequipe gouvernementale par decret, en
vertu des pouvoirs que lui confere la Constitution
et se separe des communistes. Le Gouvernement
respire. . . mais pas longtemps. Comme par enchan-
tement (M. Ramadier parle ä ce propos du fameux
« chef d'orchestre clandestin ») des conflits sociaux
naissent ä droite et ä gauche. Une greve ne se ter-
mine lä qu'on en voit renaitre une autre ailleurs,
compromettant comme en 1936 la production nationale
, c'est-ä-dire le redressement economique de
tout le pays. L'une des crises les plus aigues fut la
greve des chemins de fer; les cheminots se virent
embarques dans une action que beaucoup d'entre
eux desapprouvaient et tout en admettant que la
revalorisation des traitements des employes de che-
min de fer etait necessaire, on a pu voir dans cette
greve une epreuve de force qui a mis le Gouvernement
ä deux doigts de sa perte et dont il ne s'est
pas encore, un mois apres, completement releve.
Ce dernier se vit alors, lui aussi, embarque dans un
irresistible mouvement de hausse qui met un point
final des plus decevants ä la tentative Blum. L'in-
flation se rapproche, les prix montent, le mecon-
tentement grandit. Le Gouvernement Ramadier
sera-t-il assez fort pour tenir la barre et operer les
redressements indispensables, la fin del'annee 1947
le montrera sans doute.

Tandis que la France se voit ainsi acculee ä des
impasses plus tragiques les unes que les autres, le
monde de son cöte n'est pas moins secoue entre des
forces adverses qui s'en dispute l'hegemonie.
L'offre du general Marshall d'aider une Europe unie
dans un meme but de redressement et de recons-
truction commune aboutira peut-etre, par la faute
du refus sovietique, ä scinder celle-ci en deux blocs
hostiles aujourd'hui, demain peut-etre ennemis. Lä
aussi, l'avenir decidera s'il est dit que les forces
mauvaises parviendront une nouvelle fois ä sub-
merger les continents et ä accumuler souffrances
sur souffrances. 1,'enjeu est, ä l'heure actuelle, de
savoir si l'esprit succombera devant le materialis-
me ou au contraire s'il parviendra ä le dominer.
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